(Hong Kong) Le G7 et l’Union européenne ont dénoncé lundi une « érosion » de la démocratie à Hong Kong, où le scrutin réservé pour la première fois aux candidats « patriotes » a été salué comme un succès par la cheffe de l’exécutif du territoire.  

À peine 30 % des Hongkongais, soit 1,3 million de votants sur 4,5 millions d’électeurs, ont choisi dimanche leur Conseil législatif, nommé en vertu d’un nouveau système électoral imposé par Pékin, qui a drastiquement réduit le nombre des sièges pourvus au suffrage universel et réservé le droit d’être candidat aux seuls « patriotes ».

Il s’agit du taux de participation le plus bas depuis la rétrocession de Hong Kong à la Chine par le Royaume-Uni en 1997 et même depuis la première élection directe de membres du Conseil législatif, en 1991.

« Hong Kong est de retour sur la bonne voie, celle d’“un pays, deux systèmes” », s’est néanmoins réjouie la cheffe de l’exécutif Carrie Lam.

« Nous ne pouvons pas copier-coller le système ou les règles soi-disant démocratiques des pays occidentaux », a-t-elle ajouté, estimant que les éléments « antichinois » étaient désormais exclus et le calme politique rétabli.

Dans un communiqué commun, les ministères des Affaires étrangères des pays du G7 (France, Allemagne, Canada, États-Unis, Italie, Japon et Royaume-Uni) ont de leur côté exprimé leur « vive inquiétude face à l’érosion des éléments démocratiques du système électoral ».

Ils ont également « fermement » réitéré leur appel à la Chine de « respecter les droits et les libertés fondamentales à Hong Kong ».

Le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a de son côté estimé dans un communiqué que le scrutin était « une nouvelle étape dans le démantèlement du principe “un pays, deux systèmes” » et a appelé à un « haut degré d’autonomie ainsi qu’au respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, des principes démocratiques et de l’État de droit » à Hong Kong.

Le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères Zhao Lijian a mis l’abstention sur le dos de la pandémie. Il a également pointé du doigt « des éléments antichinois déterminés à détruire Hong Kong, et l’ingérence de forces extérieures ».

« Tension »

Résultat de la réforme électorale : l’assemblée locale est composée de fidèles au gouvernement, semblable aux organes législatifs de Pékin.

Cette année, pour être autorisé à briguer un siège, chacun des 153 candidats devait donner des gages de « patriotisme » et de loyauté politique envers la Chine.

De ce fait, les militants pour la démocratie ont été empêchés de se présenter ou y ont renoncé, lorsqu’ils ne sont pas en prison ou en fuite à l’étranger.

Plusieurs d’entre eux qui vivent en exil avaient appelé à boycotter les urnes.

Le taux de participation, thermomètre de l’adhésion des Hongkongais au nouveau système électoral, était donc particulièrement attendu.

S’abstenir, voter blanc ou nul reste légal à Hong Kong. En revanche, encourager ces pratiques constitue depuis cette année une infraction pénale, pour laquelle 10 personnes ont été arrêtées.

Les nouvelles règles ont été imposées par Pékin dans le cadre de la reprise en main de Hong Kong après les gigantesques manifestations de 2019.

Sous la souveraineté britannique ou chinoise, le territoire n’a jamais connu la pleine démocratie, ce qui a été source de grandes protestations, à plusieurs reprises.

« Exprimer la désapprobation »

Les semaines précédant le vote, le gouvernement avait fait insérer des pages de publicité dans les journaux, distribué des tracts dans les boîtes aux lettres et envoyé massivement des texto pour inciter les Hongkongais à voter. Les transports publics étaient gratuits dimanche.

La faible participation est « extrêmement embarrassante » pour le gouvernement, a estimé Kenneth Chan, politologue à l’Université baptiste de Hong Kong. « La plupart des électeurs défendant la démocratie ont décidé de s’abstenir, pour exprimer leur désapprobation », a-t-il déclaré à l’AFP.

Le « LegCo », composé de 90 législateurs dont désormais 20 élus au suffrage universel, est l’assemblée chargée de voter les lois dans l’ancienne colonie britannique de 7,5 millions d’habitants, dont le système légal reste distinct de celui de Chine continentale.

Même si la majorité des sièges du Conseil était toujours accordée aux figures acquises à Pékin, une minorité d’opposants y était jadis tolérée. Cela en faisait un lieu de débats souvent très vifs, ce qui ne sera plus le cas.

« Le nouveau Conseil législatif, désormais sous le contrôle entier de patriotes, fonctionnera de façon efficace en tant que gardien de la sécurité nationale et de l’unité », a écrit Lau Siu-kai, le vice-président du principal groupe de réflexion hongkongais favorable à Pékin, dans le quotidien d’État China Daily.

Des dizaines de figures de l’opposition militant pour la démocratie – dont un certain nombre avaient été élues aux précédentes élections en 2016 – ont été disqualifiées, sont actuellement en prison en vertu d’une loi draconienne sur la « sécurité nationale » imposée par Pékin en 2020 ou ont fui à l’étranger.